En Islande, on jette les oisillons macareux du haut des falaises, voici pourquoi
OuestFrance
Aux îles Westman, en Islande, les habitants ont coutume de jeter de jeunes macareux du haut des falaises chaque année. Une pratique étonnante, mais qui permet de préserver cette espèce d’oiseaux marins, en aidant les poussins, égarés dans les zones urbaines à cause de la pollution lumineuse, à prendre leur envol vers la haute mer.
La radio américaine NPR se fait l’écho d’une étrange coutume dans les villes côtières de l’Islande. Chaque année, entre les mois d’août et de septembre, les habitants recueillent de jeunes macareux, une espèce d’oiseaux marins, et les jettent du haut des falaises face à la mer. Une pratique visant à préserver cette espèce, dont la survie est mise à mal par la pollution lumineuse des villes.
Dans les îles Westman, 4 300 habitants, qui abritent la plus grande colonie islandaise de macareux, c’est l’effervescence durant cette période. C’est ce qu’on appelle « la saison des macareux », explique au micro de NPR Kyana Sue Powers, une créatrice de contenus numérique,s qui guide les voyageurs sur cette île. Selon elle, cette tradition annuelle est désormais « aussi normale que de recycler des boîtes de conserve ».
La pollution lumineuse perturbe les jeunes oiseaux
Les œufs des macareux moines, également appelés perroquets des mers, éclosent dans des sortes de niches ou terriers. Mais leur véritable habitat, c’est la haute mer. En principe, dès que les oisillons sont prêts à s’envoler, ils quittent le nid pour rejoindre la grande bleue. Et ils ne reviennent sur terre que quelques années plus tard, pour se reproduire.
Habituellement, pour trouver l’océan, ces bébés macareux se guident grâce à la lumière de la lune. Mais de nos jours, la pollution lumineuse chamboule tout. Les lumières des villes les égarent et leur font prendre la mauvaise direction. Ils se retrouvent complètement perdus, à errer dans les zones urbaines. Alors les Islandais se mobilisent pour leur survie.
Kyana Sue Powers explique que l’idéal est de parcourir entre 21 h et 3 h du matin les lieux urbains où il y a le plus de lumière, comme les ports, les terrains de golf, les hôpitaux, les écoles, les stations-service ou les chantiers de construction. Il est recommandé de mettre des gants pour se protéger de la grippe aviaire et aussi pour éviter de contaminer les oiseaux en les manipulant. Les gens sont invités à recueillir les oisillons égarés, puis à les placer dans une boîte tapissée d’herbe. On peut habituellement en recueillir quatre à dix en une nuit, selon elle.
Une pratique essentielle à la survie de l’espèce
Ensuite, il faut les relâcher au bord de la falaise, avant le coucher du soleil, pour éviter qu’ils soient de nouveau attirés par les lumières des villes. La méthode douce consiste à les déposer sur le sol et à attendre qu’ils s’envolent d’eux-mêmes. Quant à la méthode plus radicale, voici comment elle la décrit : « Certains les tiennent à bout de bras comme un ballon de football, les ailes sorties, puis les lancent du haut de la falaise ! »
Cette coutume annuelle est devenue essentielle pour la survie des oiseaux, selon Rodrigo A. Martínez Catalán, du Centre de recherche sur la nature du sud de l’Islande, interrogé par NPR. Car un couple de macareux – un macareux n’a qu’un seul partenaire durant sa vie – ne couve qu’un œuf par saison et ne pond pas chaque année. « Si vous ratez des générations les unes après les autres, cela peut mettre fin à la population », a-t-il déclaré.