« Je voyage dans des pays qui n’existent pas officiellement » : le curieux défi d'un globe-trotteur
Par Paul GRATIAN
Depuis des années, un voyageur brésilien s’est lancé un curieux défi : se rendre dans le plus grand nombre possible de pays non reconnus par la communauté internationale. Kosovo, Somaliland, Abkhazie… Le jeune homme nous raconte ses visites dans ces endroits très méconnus.
C’est au cours d’une année sabbatique passée à voyager à travers le monde que Guilherme Canever s’est pris d’une passion : se rendre dans des pays non reconnus par la communauté internationale.
Nous sommes en 2009 et ce jeune brésilien, alors âgé de 32 ans, décide de quitter son travail de manager dans l’industrie du bois pour partir à l’autre bout du monde. Le voyage est censé durer un an, il s’écoule finalement sur trois années. Puis, d'autres départs ont lieu au fil des ans.
« J’avais prévu de visiter l’Afrique en partant du sud vers le nord. Et puis, quand je suis arrivé en Ethiopie, on m’a parlé du Somaliland, je me suis renseigné et j’ai décidé d’y aller », se remémore-t-il aujourd’hui, joint par téléphone depuis le Brésil. Il s’agit alors de son premier contact avec un pays non reconnu.
« Un fonctionnement si proche des autres pays »
Autoproclamé indépendant de la Somalie en 1991, le Somaliland n’est pas reconnu par la communauté internationale. Une réalité qu’il découvre en allant sur place.
« J’ai quand même dû faire un visa spécial, changer de monnaie, passer une frontière. J’ai commencé à réfléchir sur cette curieuse situation. J’ai vu qu’ils avaient quand même une police, un gouvernement… Cela m’a fait bizarre de voir que l’on pouvait avoir un tel fonctionnement alors qu’aucun pays ne reconnaissait le Somaliland », explique Guilherme Canever, aujourd’hui âgé de 43 ans.
À l’époque, son voyage se poursuit en Asie, puis au Moyen-Orient. Mais cette notion de pays non reconnus lui reste dans la tête. Il se rend donc en Palestine, un pays non reconnu par de nombreux États dont la France, et élevé au rang d’État observateur des Nations unies.
« Après ces voyages, j’ai commencé à lire et à me renseigner sur ce sujet. Et puis, je me suis dit que je voulais en faire un projet. À chaque grand voyage, je partais dans des endroits réclamant leur indépendance avec des États non reconnus », poursuit ce grand baroudeur.
Plus d’une dizaine de pays non reconnus visités
Depuis, les destinations et les pays non reconnus se sont multipliés : République d’Abkhazie, Transnistrie, l’Ossétie du Sud, la Chypre du Nord, le Haut-Karabagh… Il a posé son pied dans plus d’une dizaine d’endroits au total.
Partout, il profite des beaux paysages mais surtout écoute les populations locales, ravies d’échanger avec un étranger. « J’essaie de parler en anglais, ce n’est pas toujours facile mais on s’arrange. Comme ils voient peu de touristes, ils sont très curieux, ils ont envie de partager leurs histoires et leurs cultures, de montrer leur fierté d’habituer dans ses endroits… », développe-t-il.
Si tous ces pays ont en commun de ne pas être reconnus, ils restent très différents. « Bien sûr, la vie est plus difficile, il y a souvent peu d’échanges avec l’extérieur et un manque d’infrastructure. Mais certains pays comme le Kosovo, reconnus par de nombreux pays occidentaux, voient beaucoup de touristes, sont plus développés… », a-t-il constaté.
La difficulté pour obtenir des visas varie. Il faut souvent beaucoup se renseigner en amont, pour savoir comment le pays fonctionne, par quelle frontière il est moins dangereux d’entrer, sachant que ces nations sont souvent en conflit avec certains de leurs voisins…
Des pays très méconnus
De cette série de voyage, le projet est ensuite devenu un livre, sorti en 2016 au Brésil et autopublié en anglais sur Amazon depuis le 4 juillet 2020.
Il y raconte la réalité de la vie des habitants de ses pays souvent très méconnus. « Après avoir vu tous ces endroits très uniques, j’ai eu envie d’écrire ce que j’avais vu et de retranscrire la vie parfois difficile de ces minorités, d’expliquer ses conflits, d’aborder les notions de frontières, de gouvernements… », explique ce père de deux enfants.
« Peu de personnes connaissent ces pays donc je voulais avant tout raconter l’histoire des habitants vivant dans ces pays non reconnus, pour qu’on puisse les comprendre mieux, conclut Guilherme Canever. Car selon moi, le meilleur moyen de résoudre un conflit est d’en parler et d’essayer de comprendre ».