Pipette métayer du diable

Pour se reposer quelques minutes
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Il était une fois Pipette, un brave paysan, qui s’était loué comme tout le monde, à la Saint Michel, dans une métairie qui se trouvait appartenir a la ferme du diable. Oh le diable n’était pas un mauvais patron, mais comme tous ces gens qui ne sont pas de la campagne il ne comprenait pas grand chose au fonctionnement d’une ferme. Je crois qu’il aurait mieux fait de rester derrière ses fourneaux, que voulez vous, lui aussi sans doute avait entendu les écologistes parler du retour à la nature.

Et comme disait Pipette à ses copains de bistro en buvant son 51 : est ce que tromper un trompeur est vraiment une faute ? Après tout s’il était venu dans le coin le diable n’y était certainement pas gratuitement il devait bien veiller quelques âmes par ci par là.

La première année le patron qui n’était pas vraiment au courant, mais qui voulait montrer son autorité avait demandé à Pipette de tout planter, qu’il lui donnerait en partage ce qui était hors du sol et lui prendrait ce qu’il y a sous terre.
Il avait sans doute depuis l’enfer pu voir les raves, qui pointaient sur son plafond.
Pipette accepte bien entendu, mais il avait son idée : cette année là il a planté du blé sur toute la ferme. et le malin Pipette avait pu vendre du bon grain tandis que le diable avec ses rastouls et leurs racines ne faisait pas fortune !
On s’était bien moqué de lui aux marchés de Saint Pompon et de Blanquefort sur Briolance où il avait présenté sa récolte.

Selon l’usage la récolte suivante avait été plantée en pommes de terre,

Pour ne pas se faire estamper une fois de plus il exige: «ce qui vient sur la terre» et comme l’année précédente Pipette avait pu porter à Montpazier, et à Villefranche des boisseaux de pommes de terre alors que son patron avec ses feuilles n’avait pu gagner un sou et passait encore pour le tindaurel de service. Aussi le lendemain en faisant bouillir la baccade pour les cochons, le Pipette craignait un peu pour ses côtes, le patron pouvait lui donner une bonne avoinée. Heureusement quand le diable arrive Pipette avait senti l’odeur du soufre et a eu le temps de sortir les braises de sous la toupine de se munir d’un fouet . Le diable le trouve en train de fouetter la toupine.
Il est curieux le diable il veut toujours savoir ce qui se passe pour essayer de le tourner en mal.
«Qu’est ce que tu fais là Pipette»
«Eh vous voyez bien je fais cuire la baccade des cochons»
«Mais pourquoi avec un fouet» ?
«Eh pardi c’est une belle économie»
«ça m’arrangerait bien pour mes fourneaux d’enfer, tu veux bien me vendre ton fouet» ?
«Si vous voulez patron vous savez bien que je ne vous refuse jamais de vous satisfaire»

Il achète le fouet de Pipette et une fois rentré chez lui dit à sa femme :
«je viens de faire une bonne affaire j’ai acheté le fouet de Pipette»
«comme toujours» se moque-t-elle sans même demander à voir ce qu’il ramenait.

Il rempli une marmite d’eau et se met à taper dessus comme un forcené, en pure perte bien sûr ; l’eau n’a jamais voulu bouillir.
« Ah, ce Pipette m’a encore trompé», j’y retourne !
Furieux il va à la métairie : «Tu m’as encore trompé»!
«mais patron c’est vous qui m’avez demandé d’acheter mon fouet,; je vous l’ai vendu».

Pipette était en train de fermer des sacs
«qu’est ce que tu fais encore là»
«Vous voyez bien : je ferme des sacs pour les mener à la foire»
Flairant la bonne affaire encore le diable demande à Pipette de les lui vendre, il pensait que c’était de la laine, rien qu’en touchant à travers la toile
Pipette accepte et le diable lui donne tout ce qui restait dans sa bourse .
Il rentre chez lui et se vante encore devant sa femme d’avoir fait une bonne affaire. Elle ricane, «encore une «? et quand il a ouvert les sacs il a vu qu’il s’agissait de mousse et non de laine.

Furieux il revient chez Pipette en rondinant «ce Pipette mérite la mort», je me vais lui montrer à ce grand coulifandre qu’on ne se moque pas impunément de moi.

Il arrive chez Pipette le trouve en train de faire sa sieste, le fourre dans un sac, et s’en va vers la Dordogne. Le Pipette pardi, il n’en menait pas large.
Par chance ayant besoin de souffler un peu, en arrivant sur le pont de Cenac, il lui prend aussi un petit besoin pressant.
On a beau être le diable on peut avoir des usages : laissant là le sac attaché il s’en va dans les saules de chez Fannier pour se soulager discrètement.
Passe à ce moment là un marchand de cochons qui menait une centaine de cochons à Gaillardou.
Voyant le sac il s’approche, curieux, pour en deviner le contenu. Il tâte un peu et demande à haute voix : «qu’est ce qu’il peut bien y avoir là dedans» ?
«Il y a moi» réponds Pipette
«Qui ça» ? dit le marchand en faisant un bond.
«Pipette : on m’emporte pour me faire marier la fille du roi, qui est riche comme pas une et belle comme le jour, mais je préfère ma copine du Plantier».
« Ah si ça t’arrange, dit le marchand je veux bien prendre ta place»
«Si ça te fait vraiment plaisir je te la laisse mais dépêche toi».
Le marchand de cochons se dépêche de remplacer Pipette dans le sac, et Pipette s’en va avec le troupeau de cochons.

Lorsque le diable remonte ayant soulagé sa vessie, il ne s’aperçoit de rien et «un, deux, trois, tu ne me tromperas plus», il jette le sac à l’eau.
En rentrant chez lui, il passe encore devant la métairie et voit Pipette en train de loger les cochons dans leurs soues.
«C’est bien toi Pipette» , dit-il en se frottant les yeux.
«qui voulez vous que ce soit» ?
«Mais comment as tu fait pour sortir de l’eau» ?
«J’y serai bien resté si je n’y avais pas trouvé tous ces cochons et si seulement j’avais eu une pierre au cou, pour y rester plus longtemps, j’en aurai ramené le double».
« Tu me fais envie d’un plus grand troupeau que le tien : rends moi service»
Alors Pipette a attaché le diable dans le sac avec une grosse pierre au cou, l’a chargé sur le carretou, et il est allé le jeter dans le Dordogne.
C’est sans doute pour ça qu’on ne le voit plus si souvent qu’autrefois, roder à Cenac.

Cric crac mon counto es acabat
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:clap: :top: Merci ::D:
Il en va de la cuisine comme des plus belles œuvres de l'art : On ne sait rien d'un plat tant qu'on ignore l'intention qui l'a fait naître.
- Daniel Pennac / Le dictateur et le hamac -
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