L'ISF, emblème en péril
Le billet du jour, par Antonio Fischetti
On peut dire ce qu'on veut sur la gauche et la droite, mais il y a quand même – du moins en théorie – de petites différences entre elles. Il n'est pas inutile de le rappeler, surtout à une époque où de plus en plus de gens s'obstinent à brouiller les pistes. Dans le lot, quand vous avez un Emmanuel Macron qui se dit « pas à droite, pas à gauche », et une Marine le Pen qui, elle, se dit à la fois « et de droite et de gauche ». On comprend que les électeurs soient paumés.
De toutes les mesures qui permettraient de distinguer la droite de la gauche, il y en a une de taille : c'est l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), créé en 1982 par le gouvernement de Pierre Mauroy. Aux jeunes qui n'ont pas connu cette époque, rappelons que c'étaient les premières années Mitterrand, et personne n'aurait alors songé à nier toute signification au mot « gauche ».
Or, les temps changent. Il aura fallu quelques années avant de toucher à cet emblème qu'est l'ISF, mais de plus en plus de voix osent aujourd'hui réclamer sa suppression. C'est évidemment le cas de Fillon (et aussi de Juppé). Au PS, Macron a également suggéré de le supprimer. Valls l'a vaguement grondé, alors que lui-même, dans un livre publié en 2011, proposait « sans tabou de supprimer l'ISF, inutile car peu rentable ».
Il faut quand même préciser que l'ISF rapporte plus de 5 milliards d'euros par an. Ça n'est pas rien : presque autant que le budget du Ministère de la culture et de la communication (7,3 milliards d'euros en 2016). Même Marine Le Pen, dans sa lèche venimeuse aux prolos, avait déclaré que la suppression de l'ISF serait une « injustice ». Ne pas laisser le maintien de l'impôt sur la fortune à l'extrême droite, ce serait déjà au moins ça, être de gauche.